lire en ligne la nouvelle le bassin du dieu de pierre d'Abraham Merritt

The Pool of the Stone God (« Le bassin du dieu de pierre ») est une nouvelle fantastique et horrifique d’Abraham Merritt, publiée le 23 septembre 1923 sous le nom W. Fenimore dans The American Weekly. Merrit est peut-être aujourd’hui surtout connu en France pour son roman La Nef d’Isthar (1924) et son influence sur Lovecraft, qui l’admirait. C’est d’ailleurs bien à ce dernier que peut faire penser ce « bassin du dieu de pierre », tant par le thème que par le style, et je renvoie les curieux à ma traduction de la nouvelle Ce qu’apporte la lune de Lovecraft, publiée également en 1923. Dans l’immédiat, le lecteur trouvera ci-après une traduction personnelle de la nouvelle de Merritt, qui pourra être modifiée au besoin, suivie d’un bref commentaire et du texte en langue d’origine (États-Unis).

Le Bassin du Dieu de pierre – Abraham Merritt

Voici l’histoire du professeur James Marston. Une vingtaine de sociétés savantes lui ont fait la courtoisie de l’entendre, puis les éminences se sont désolées entre elles qu’un homme si brillant fasse montre d’une pareille lubie. Le professeur Marston me l’a rapportée à San Francisco, juste avant qu’il n’entreprenne de retrouver l’île qui renferme son bassin du dieu de pierre et – les ailes qui le gardent. Il m’a paru tout à fait sain d’esprit. Il est vrai que le matériel emporté pour son expédition était inhabituel, et les tenues pourvues de cottes de mailles, de masques et de gantelets dont chaque homme de l’équipe est pourvu n’en sont pas la part la moins intrigante.

Nous étions tous les cinq, dit le professeur Marston, assis côte à côte sur la plage. Il y avait Wilkinson, l’officier en second, Bates et Cassidy les deux matelots, Waters le pêcheur de perles et moi-même. Nous avions tous fait voile vers la Nouvelle-Guinée, pour ma part afin d’y étudier les fossiles pour le compte de la Smithsonian. La nuit précédente, le Moranus avait heurté l’écueil caché et avait vite sombré. Nous étions alors, à peu près, à cinq cent miles au nord-est de la côte de Guinée. C’est tous les cinq que nous avions réussi à mettre à l’eau le canot de sauvetage et à nous échapper. Le canot était bien pourvu en eau et en nourriture. Nous ignorions si le reste de l’équipage était parvenu à s’enfuir. Nous avions aperçu l’île à l’aube et nous avions pris sa direction. Le canot de sauvetage était échoué sur le sable, intact.
« Nous ferions bien d’explorer un peu, en tout cas, dit Waters. Il se pourrait que ce soit pour nous l’endroit parfait où attendre les secours. Au moins jusqu’à la fin de la saison des typhons. Nous avons nos pistolets. Commençons par remonter ce ruisseau à sa source, jeter un œil aux alentours, et ensuite nous déciderons la marche à suivre. »
Bientôt les arbres arbres se firent rares. Nous vîmes au-devant un espace découvert. Nous y parvînmes et nous immobilisâmes, frappés de stupeur. La clairière s’avérait parfaitement carrée, d’une profondeur de cinq cent pieds. Les arbres s’arrêtaient brusquement sur ses bords comme s’ils étaient repoussés par une chose invisible.
Mais ce ne fut pas cette impression curieuse qui nous retint. Au fin fond du carré se dressait une douzaine de huttes de pierre rassemblées autour d’une autre, légèrement plus grande. Elles me rappelèrent fortement ces constructions préhistoriques que l’on voit par endroits en Angleterre ou en France. J’en viens maintenant à la chose la plus singulière de tout ce lieu singulier et sinistre. Il y avait au centre de l’étendue un bassin emmuré par de gros blocs de pierre taillée. À côté du bassin se dressait une haute figure de pierre, sculptée à la semblance d’un homme aux mains tendues. Elle mesurait au moins vingt pieds de haut et était remarquablement bien façonnée. De loin la statue paraissait nue, et pourtant elle donnait une étrange illusion de drapé. Comme nous approchions, nous vîmes qu’elle était recouverte des chevilles aux cou des plus extraordinaires ailes sculptées. Elles ressemblaient parfaitement aux ailes de chauves-souris lorsqu’elles sont repliées. De cette statue provenait quelque chose d’extrêmement troublant. Le visage était d’une laideur et d’une perfidie indicibles. Les yeux bridés s’inclinaient, obliques et maléfiques. Ce n’était semblait-il pas du visage, cependant, qu’émanait cette impression. C’était du corps recouvert d’ailes – en particulier des ailes. Elles faisaient partie de l’idole, et pourtant elles donnaient à penser qu’elles s’y accrochaient.
Cassidy, qui tenait de la bête brute, avança avec assurance jusqu’à l’idole et posa la main dessus. Il l’en retira vivement, visage blême, bouche frémissante. Je le suivis et, surmontant ma répugnance qui ne se fondait sur rien de scientifique, examinai la pierre. De même que les huttes, et à vrai dire l’endroit entier, elle était clairement l’œuvre de cette race oubliée dont les monuments parsèment le sud du Pacifique. Le cisèlement des ailes était magnifique. Elles évoquaient celles des chauves-souris, comme je l’ai dit, et chacune, repliée, comprenait à son extrémité une étroite bordure de plumes, représentées de façon conventionnelle. Leur taille variait entre quatre et dix pouces. Je passais mes doigts sur l’une d’elles. Jamais je n’ai ressenti de nausée pareille à celle qui me précipita à genoux devant l’idole. L’aile m’avait paru douce et froide comme la pierre, mais j’avais eu la sensation de toucher, au-delà de la pierre, quelque obscène et monstrueuse créature issue d’un monde inférieure. Cette sensation bien sûr était due, raisonnai-je, aux seules température et texture de la pierre – néanmoins, cela ne m’apaisa pas vraiment.
Le crépuscule n’allait pas tarder. Nous décidâmes de retourner sur la plage et d’examiner la clairière plus avant le lendemain. Je souhaitais grandement explorer les huttes de pierre.
Nous entreprîmes de rebrousser chemin à travers la forêt. Nous parcourûmes une certaine distance, puis la nuit tomba. Nous perdîmes le ruisseau. Au bout d’une demi-heure d’errance, nous l’entendîmes de nouveau. Nous nous efforçâmes de le retrouver. Les arbres se raréfièrent, nous crûmes que nous approchions de la grève. Waters m’étreignit le bras. Je fis halte. Droit devant nous s’étendait l’espace découvert où le dieu de pierre lorgnait sous la lune, l’eau verte étincelant à ses pieds !
Nous avions tourné en rond. Bates et Wilkinson étaient épuisés. Cassidy se mit à jurer que, en présence ou non de tous les diables, il avait l’intention de camper cette nuit auprès du bassin !
La lune resplendissait. Tout était très calme. Ma curiosité scientifique prit le dessus, et la pensée me vint d’examiner les huttes. Laissant Bates monter la garde, je me dirigeai vers la plus grande. Il n’y avait qu’une seule chambre, et le clair de lune qui pénétrait à travers les fissures du mur l’éclairait distinctement. Au fond étaient disposés deux petites vasques creusées dans la pierre. Je regardai dans l’une d’elles et vis, à peine perceptible, une lueur rougeâtre réfléchie par un grand nombre d’objets sphériques. J’en sortis une demi-douzaine. C’étaient des perles, des perles extrêmement magnifiques dont la couleur était d’un rose singulier. Je me précipitai vers la porte pour héler Bates – et me figeai !
Mon regard avait été attiré par l’idole de pierre. S’agissait-il d’un effet du clair de lune, ou avait-elle bougé ? Non, c’étaient les ailes ! Elles saillaient de la pierre et ondoyaient – elles ondoyaient, dis-je, des chevilles au cou de cette statue monstrueuse.
Bates aussi les avait vues. Il s’était levé, pistolet brandi. Enfin, il y eut un tir. Puis l’air s’emplit d’une ruée sonore comme celui d’un millier d’éventails agités. Je vis les ailes se libérer du dieu de pierre et s’étendre en nuée au-dessus des quatre hommes. Une autre nuée monta à toute allure du bassin et les rejoignit. Je ne pouvais pas bouger.
Les ailes tournoyaient rapidement tout autour des quatre hommes. Ils étaient tous debout, à présent, et je n’avais jamais contemplé une horreur pareille à celle qui se voyait sur leurs visages. Alors les ailes s’agglutinèrent. Elles s’accrochèrent à mes compagnons ainsi qu’elles l’avaient fait à la pierre.
Je me repliai dans la hutte. Je restais couché là durant la nuit, en proie à une folle terreur. J’entendis bien des fois auprès de l’enceinte la ruée à bruit d’éventails, mais rien ne pénétra dans ma hutte. L’aube vint, avec le silence, et je me traînai vers la porte. Là se dressait le dieu de pierre, ainsi que les ailes sculptées sur lui, comme nous l’avions découvert dix heures auparavant !
Je me précipitai vers les quatre hommes qui gisaient sur l’herbe. Je m’imaginais que peut-être j’avais fait un cauchemar. Mais ils étaient morts. Ce n’était pas le pire. Chacun s’était atrophié jusqu’à l’os ! Ils ressemblaient à des dirigeables blancs effondrés. Il n’y avait plus trace en eux d’une goutte de sang. Ils n’étaient plus que des ossements enveloppés dans la finesse de la peau !
Retrouvant la maîtrise de moi-même, je m’approchai de l’idole. Elle avait quelque chose de différent. Elle paraissait plus imposante – comme si, cette pensée me traversa l’esprit, comme si elle avait mangé. Puis je m’aperçus qu’elle était couverte de petites gouttes de sang, qui étaient tombées depuis les extrémités des ailes qui la revêtaient !
Je ne me souviens pas de ce qui se passait par la suite. Je m’éveillai sur le Luana, voilier perlier qui m’avait recueilli, rendu fou par la soif, comme il est supposé, sur le canot du Moranus.

lire nouvelle d'Abraham Merritt
La Une d’un numéro du American Weekly, daté novembre 1923. On était loin des pulps !

Contexte de publication

Comme indiqué en préambule, The Pool of the Stone God est publiée dans The American Weekly, supplément du dimanche du New York Evening Journal, qui appartenait au célèbre magnat de la presse William Randolph Hearst (Citizen Kane !). Merritt est alors assistant d’édition du American Weekly, ce qui peut expliquer l’usage, semble-t-il exceptionnel, du pseudonyme W. Fenimore : Merritt (qui ailleurs signait simplement ses textes : A. Merritt) gagne de toute façon très bien sa vie en tant que journaliste, et les revenus éventuels dus à la publication d’une nouvelle ne constituaient guère que des à-côtés.
Merritt n’est d’ailleurs pas un écrivain de fiction très prolifique : quand paraît The Pool of the Stone God, il n’a publié qu’une poignée de nouvelles et romans dans des magazines pulps, mais c’est ce qui lui vaut déjà l’attention de Lovecraft, ou encore Robert E. Howard (Conan), auteurs avec qui entre autres il collabore à l’écriture de la nouvelle The Challenge from Beyond (1935).
La nouvelle peut aussi rappeler le roman The Moon Pool (1919) de Merritt, publiée en français sous le titre Le Gouffre de la lune (1975), dans lequel il était déjà question d’entité supérieure terrifiante et de vampirisme.
En France, la nouvelle a fait l’objet de plusieurs publications : dès 1999 dans une traduction de Marc Madouraud dans l’anthologie God save science-fiction 2, aux éditions Recto Verso ; en 2016 dans la revue Wendigo n°3, publiée par la maison d’édition associative L’Œil du Sphinx, qui reprenait à priori la traduction de Marc Madouraud ; en 2021 pour Gloubik éditions, dans une traduction de Denis Blaizot.

Pistes d’analyse

La nouvelle ne devrait pas prendre au dépourvu les habitués de Lovecraft ou du fantastique des pulps. On en retrouve des éléments caractéristiques : dieu monstrueux, ruines, chauves-souris et vampires, horreur indicible, isolement des personnages qui aboutissent à leur mort tragique, à l’exception ici du narrateur dont la fiabilité et la santé mentale sont remises en cause…
On pourra en outre relever la présence d’un récit-cadre, très bref, dans lequel un narrateur utilisant la première personne nous introduit le protagoniste du récit enchâssé, le professeur Marston, dévoilant immédiatement que celui-ci va survivre à son premier voyage et s’apprête à tenter une nouvelle expédition (Merritt jouait-il avec l’idée d’un personnage récurrent ? Marston pourrait ainsi être perçu comme un précurseur de John Kenton, protagoniste du roman La Nef d’Ishtar), le détail devant susciter l’intérêt du lecteur étant le port obligatoire de cottes de mailles.
À noter, le brave professeur travaille pour la Smithsonian : il s’agit d’une institution prestigieuse gérée par l’État américain, associée à divers musées et galeries. Ce petit détail réaliste peut servir à corroborer le sérieux du personnage, qui a même accès à des sociétés savantes. Mais la chute de la nouvelle laisse planer l’ambiguïté : Marston n’a-t-il pas été victime d’un épisode de folie ? Il faut dire que le nom de son navire, le Moranus, fait écho au latin morus, qui signifierait… fou. Le Luana, navire perlier auquel il doit son salut, a peut-être des racines communes avec le mot lune, et le clair de lune bien sûr est un élément attendu du fantastique qui joue son rôle dans la nouvelle. Des noms symboliques, une soif terrible, et voilà qui pourrait expliquer la vision d’horreur d’un dieu vampirique, adoré autrefois par des pêcheurs de perle !
Merritt donc se garde de fournir trop d’explications : pourquoi Marston échappe-t-il aux ailes vampiriques, si l’on admet l’hypothèse du fantastique ? C’est peut-être qu’archéologue, sa soif de connaissances le rend plus sensible au mysticisme et aux rituels (à l’opposé de Cassidy, brute qui défie les superstitions et le paye !). Il trouve des vasques qui rappellent en miniature le bassin du dieu de pierre, mais alors que celui-ci est vide et demande à être rempli, les vasques quant à elles sont pleines de perles roses (de qualité, donc !), perles roses qui évoquent symboliquement les gouttes de sang qui désaltère le dieu oublié et assoiffé. Marston, au fond, s’est comporté en prêtre ou en adorateur du dieu ! On peut aussi soupçonner qu’il s’est attiré une sorte de malédiction : maintenant qu’il a touché les perles, il ne songe qu’à retrouver l’île, comme si une soif étrange ne le quittait plus. Ce type d’obsession joue bien des tours aux aventuriers…

The Pool of the Stone God  Abraham Merritt short story
Prométhée supplicié, peinture de Paul Rubens, 1618.

The Pool of the Stone God – Abraham Merritt

This is Professor James Marston’s story. A score of learned bodies have courteously heard him tell it, and then among themselves have lamented that so brilliant a man should have such an obsession. Professor Marston told it to me in San Francisco, just before he started to find the island that holds his pool of the stone god and– the wings that guard it. He seemed to me very sane. It is true that the equipment of his expedition was unusual, and not the least curious part of it are the suits of fine chain mail and masks and gauntlets with which each man of the party is provided.

The five of us, said Professor Marston, sat side by side on the beach. There was Wilkinson the first officer, Bates and Cassidy the two seamen, Waters the pearler and myself. We had all been on our way to New Guinea, I to study the fossils for the Smithsonian. The Moranus had struck the hidden reef the night before and had sunk swiftly. We were then, roughly, about five hundred miles northeast of the Guinea coast. The five of us had managed to drop a lifeboat and get away. The boat was well stocked with water and provisions. Whether the rest of the crew had escaped we did not know. We had sighted the island at dawn and had made for her. The lifeboat was drawn safely up on the sands.
« We’d better explore a bit, anyway, » said Waters. « This may be a perfect place for us to wait rescue. At least until the typhoon season is over. We’ve our pistols. Let’s start by following this brook to its source, look over the place and then decide what we’ll do. »
The trees began to thin out. We saw ahead an open space. We reached it and stopped in sheer amazement. The clearing was perfectly square and about five hundred feet wide. The trees stopped abruptly at its edges as though held back by something unseen.
But it was not this singular impression that held us. At the far end of the square were a dozen stone huts clustered about one slightly larger. They reminded me powerfully of those prehistoric structures you see in parts of England and France. I approach now the most singular thing about this whole singular and sinister place. In the center of the space was a pool walled about with huge blocks of cut stone. At the side of the pool rose a great stone figure, carved in the semblance of a man with outstretched hands. It was at least twenty feet high and was extremely well executed. At the distance the statue seemed nude and yet it had a peculiar effect of drapery about it. As we drew nearer we saw that it was covered from ankles to neck with the most extraordinary carved wings. They looked exactly like bat wings when they were folded.
There was something extremely disquieting about this figure. The face was inexpressibly ugly and malignant. The eyes, Mongol-shaped, slanted evil. It was not from the face, though, that this feeling seemed to emanate. It was from the body covered with wings–and especially from the wings. They were part of the idol and yet they gave one the idea that they were clinging to it.
Cassidy, a big brute of a man, swaggered up to the idol and laid his hand on it. He drew it away quickly, his face white, his mouth twitching. I followed him and conquering my unscientific repugnance, examined the stone. It, like the huts and in fact the whole place, was clearly the work of that forgotten race whose monuments are scattered over the Southern Pacific. The carving of the wings was wonderful. They were batlike, as I have said, folded and each ended in a little ring of conventionalized feathers. They ranged in size from four to ten inches. I ran my fingers over one. Never have I felt the equal of the nausea that sent me to my knees before the idol. The wing had felt like smooth, cold stone, but I had the sensation of having touched back of the stone some monstrous obscene creature of a lower world. The sensation came of course, I reasoned, only from the temperature and texture of the stone–and yet this did not really satisfy me.
Dusk was soon due. We decided to return to the beach and examine the clearing further on the morrow. I desired greatly to explore the stone huts.
We started back through the forest. We walked some distance and then night fell. We lost the brook. After a half hour’s wandering we heard it again. We started for it. The trees began to thin out and we thought we were approaching the beach. Then Waters clutched my arm. I stopped. Directly in front of us was the open space with the stone god leering under the moon and the green water shining at his feet!
We had made a circle. Bates and Wilkinson were exhausted. Cassidy swore that devils or no devils he was going to camp that night beside the pool!
The moon was very bright. And it was so very quiet. My scientific curiosity got the better of me and I thought I would examine the huts. I left Bates on guard and walked over to the largest. There was only one room and the moonlight shining through the chinks in the wall illuminated it clearly. At the back were two small basins set in the stone. I looked in one and saw a faint reddish gleam reflected from a number of globular objects. I drew a half dozen of them out. They were pearls, very wonderful pearls of a peculiarly rosy hue. I ran toward the door to call Bates–and stopped!
My eyes had been drawn to the stone idol. Was it an effect of the moonlight or did it move? No, it was the wings! They stood out from the stone and waved–they waved, I say, from the ankles to the neck of that monstrous statue.
Bates had seen them, too. He was standing with his pistol raised. Then there was a shot. And after that the air was filled with a rushing sound like that of a thousand fans. I saw the wings loose themselves from the stone god and sweep down in a cloud upon the four men. Another cloud raced up from the pool and joined them. I could not move.
The wings circled swiftly around and about the four. All were now on their feet and I never saw such horror as was in their faces. Then the wings closed in. They clung to my companions as they had clung to the stone.
I fell back into the hut. I lay there through the night insane with terror. Many times I heard the fan-like rushing about the enclosure, but nothing entered my hut. Dawn came, and silence, and I dragged myself to the door. There stood the stone god with the wings carved upon him as we had seen him ten hours before!
I ran over to the four lying on the grass. I thought that perhaps I had had a nightmare. But they were dead. That was not the worst of it. Each man was shrunken to his bones! They looked like collapsed white balloons. There was not a drop of blood in them. They were nothing but bones wrapped around in thin skin!
Mastering myself, I went close to the idol. There was something different about it. It seemed larger–as though, the thought went through my mind, as though it had eaten. Then I saw that it was covered with tiny drops of blood that had dropped from the ends of the wings that clothed it!
I do not remember what happened afterward. I awoke on the pearling schooner Luana which had picked me up, crazed with thirst as they supposed in the boat of the Moranus.