« A Very Short Story » (traduit communément « Une très courte histoire ») est une nouvelle d’Ernest Hemingway publié d’abord en 1924 dans une première version de son recueil In Our Time (« De nos jours », ou « En nos jours » si l’on suit la référence biblique de ce titre inspiré du livre de la prière commune). L’auteur américain s’inspire de faits qui lui sont réellement arrivés pour raconter une histoire d’amour au temps de la Première Guerre mondiale : Hemingway et Agnes von Kurowsky, tous deux américains membres de la croix Rouge, servent de modèle aux personnages de la nouvelle. J’en propose ici deux traductions personnelles, suivies de notes et d’éléments de contexte et d’analyse, ainsi que du texte original en anglais (États-Unis).
[1ère version : je m’efforce ici de conserver le plus possible certaines particularités stylistiques du texte américain, notamment les répétitions, les juxtapositions, la multiplication des conjonctions de coordinations (« et »), voire les ruptures syntaxiques : autant d’éléments qu’Hemingway me paraît utiliser pour renforcer les sous-entendus et la dimension elliptique du récit, et que le français aurait tendance à atténuer (voir la deuxième version.]
Une très courte histoire
Par une chaude soirée, à Padoue, on le porta jusque sur le toit et il put contempler la ville d’un bout à l’autre. Il y avait des martinets ramoneurs dans le ciel. Au bout d’un moment, il fit sombre et les projecteurs firent leur apparition. Les autres descendirent et emportèrent les bouteilles avec eux. Lui et Luz pouvaient les entendre, sur le balcon en dessous. Luz s’assit sur le lit. Elle était paisible et fraîche dans la chaleur de la nuit.
Luz resta de garde de nuit pendant trois mois. On était content de la laisser faire. Quand on l’opéra, elle le prépara pour la table d’opération ; et on répéta une blague à propos d’Allemand ou lavement. Mis sous anesthésie, il se referma sur lui-même afin de ne pas bavasser à tort et à travers, lors du moment des sottises et du bavardage. Une fois qu’il fut sur des béquilles, il prit l’habitude de prendre les températures pour que Luz n’ait pas à quitter le lit. Il n’y avait que quelques patients, et tous étaient au courant. Ils aimaient tous Luz. Lorsqu’il revenait, en longeant les couloirs, il pensait à Luz dans son lit à lui.
Avant qu’il ne retourne sur le front, ils se rendirent au Duomo et prièrent. C’était obscur et calme, et il y avait d’autres gens qui priaient. Ils voulaient se marier, mais il n’y avait pas assez de temps pour les bans, et aucun d’eux n’avait son certificat de naissance. Ils avaient l’impression d’être mariés, mais ils voulaient que tout le monde le sache, et de façon à ne pas pouvoir perdre leurs sentiments.
Luz lui écrivit de nombreuses lettres qu’il ne reçut qu’après l’armistice. Quinze d’entre elles arrivèrent par paquet sur le front, et il les classa par dates et les lut toutes d’une traite. Elles évoquaient toute l’hôpital, et combien elle l’aimait, et comme il était impossible de tenir bon sans lui, et comme il lui manquait affreusement, la nuit.
Après l’armistice ils tombèrent d’accord qu’il devait rentrer au pays pour trouver un travail, pour qu’ils puissent se marier. Luz ne viendrait pas tant qu’il n’aurait pas un bon travail et ne pourrait pas venir à New York la chercher. Il était entendu qu’il ne boirait pas, et il ne voulait pas voir ses amis ou qui que ce soit aux États-Unis. Rien qu’un travail, et être marié.
Dans le train de Padoue à Milan, ils se disputèrent parce qu’elle refusait de venir tout de suite au pays avec lui. Quand ils durent se dire au revoir, à la gare de Milan, ils eurent un baiser d’adieu, mais leur dispute n’était pas réglée. Ça le rendit malade, un au revoir pareil.
Il alla en Amérique sur un bateau qui partait de Gênes. Luz retourna à Pordenone pour ouvrir un hôpital. Là-bas, c’était la solitude et la pluie, et un bataillon d’arditi avait pris ses quartiers en ville. Comme il restait dans la ville boueuse, pluvieuse pour l’hiver, le major du bataillon fit la cour à Luz, et elle n’avait jamais connu d’Italiens auparavant, et finalement elle écrivit aux États-Unis que leur liaison n’avait été qu’une amourette. Elle était désolée, et elle savait qu’il ne pourrait sans doute pas comprendre, mais la pardonnerait peut-être un jour, et lui serait reconnaissant, et elle s’attendait, de façon absolument inattendue, à être mariée au printemps. Elle l’aimait toujours autant, mais elle s’apercevait à présent que ça n’avait été qu’une amourette. Elle espérait qu’il ferait une grande carrière, et croyait en lui absolument. Elle savait que tout était pour le mieux.
Le major ne l’épousa pas au printemps, ou à un autre moment. À ce sujet, Luz ne reçut jamais de réponse à la lettre envoyée à Chicago. Peu après il contracta la gonorrhée, transmise par une vendeuse d’un grand magasin du Loop, en traversant Lincoln Park en taxi.
[2ème version : je suis peut-être cette fois plus explicite et j’atténue notamment les répétitions.]
Une bien courte histoire
Lors d’une chaude soirée, à Padoue, il fut transporté sur le toit, d’où il put contempler la ville entière. Des martinets passaient au-dessus. Au bout d’un moment, le ciel s’assombrit et la lumière des projecteurs brilla avec éclat. Les autres redescendirent, emportant avec eux les bouteilles. Lui et Luz pouvaient entendre leurs voix, qui montaient du balcon en dessous. Luz s’assit sur le lit. Dans la chaleur de la nuit, elle était détendue et fraîche.
Elle resta de service de nuit trois mois durant. Tous étaient contents de la laisser faire. Quand il fut opéré, c’est elle qui le prépara pour la table d’opération ; et ils échangèrent une blague à propos d’ami ou énème. Sous anesthésie, il se renferma en lui-même pour éviter de jacasser, quand le produit ferait effet et que viendrait le moment des paroles en l’air. Quand il put tenir sur des béquilles, il se mit à prendre les températures pour que Luz n’ait pas à se lever. Les patients n’étaient pas nombreux, tous étaient au courant. Tous aimaient Luz. Comme il repartait, en longeant les couloirs, il imaginait Luz dans son lit.
Avant son retour au front, ils se rendirent au Duomo pour prier. Le lieu était obscur et calme, d’autres gens y priaient. Ils voulaient se marier, or le temps manquait pour la publication des bans, d’ailleurs aucun d’eux n’avait de certificat de naissance. Ils avaient le sentiment d’être deux époux, mais ils voulaient que tout le monde le sache, pour faire en sorte de ne pas le perdre.
Luz lui écrivit de nombreuses lettres qu’il reçut seulement après l’armistice. Un paquet de quinze d’entre elles lui parvint sur le front, qu’il classa par date et lut d’une traite. Toutes décrivaient la vie à l’hôpital, et à quel point elle l’aimait, à quel point il était impossible de s’accrocher sans lui, à quel point il lui manquait terriblement la nuit.
Après l’armistice ils convinrent qu’il devait rentrer pour trouver un travail, afin qu’ils puissent se marier. Luz ne rentrerait que lorsqu’il aurait un travail stable et pourrait venir à New York la retrouver. Il était bien entendu qu’il ne boirait pas, et il ne tenait pas à voir ses amis ou qui que ce soit d’autre aux États-Unis. Il voulait seulement un travail, et se marier.
Dans le train qui allait de Padoue à Milan, ils se disputèrent au sujet de son refus à elle de rentrer tout de suite au pays. Quand il leur fallut se dire au revoir, à la gare de Milan, ils échangèrent un baiser d’adieu, mais ils n’avaient pas mis un terme à la dispute. En repensant à cette séparation, il était écœuré.
Il prit un bateau à Gênes pour aller en Amérique. Luz retourna à Pordenone pour y ouvrir un hôpital. L’endroit était solitaire et pluvieux, or un bataillon d’arditi avait pris ses quartiers en ville. Quitte à rester tout l’hiver dans cette ville boueuse et pluvieuse, le major du bataillon courtisa Luz, qui n’avait jamais connu d’Italiens auparavant, et finalement écrivit aux États-Unis pour déclarer que leur relation n’avait été qu’un amour de jeunesse. Elle était navrée, consciente qu’il n’arriverait sans doute pas à comprendre, mais lui pardonnerait peut-être un jour, et même lui serait reconnaissant, et par ailleurs elle s’attendait, de façon tout à fait inopinée, à se marier au printemps. Elle l’aimait comme auparavant, mais elle s’apercevait à présent que ça n’avait été entre eux qu’une passade. Elle espérait qu’il aurait une belle carrière, et croyait en lui sans conteste. Elle savait que les choses étaient pour le mieux.
Le major ne l’épousa pas au printemps, ni à aucun autre moment. Luz ne reçut jamais de réponse à la lettre qu’elle avait envoyée à Chicago à ce sujet. Peu de temps après il contracta une blennorragie, refilée par une vendeuse d’un grand magasin du centre, alors qu’il traversait Lincoln Park en taxi.
Notes :
La blague « Allemand ou lavement », ou « ami ou énème » : le texte américain indique « a joke about friend or enema », soit un jeu de mots délicat à traduire autour de l’expression « friend or enemy ? » (« ami ou ennemi ? »), qui sert à interpeller d’autres soldats en cas de mauvaise visibilité. « enema » est en fait un lavement. « énème » en français désigne un ancien remède appliqué sur des plaies sanglantes.
Duomo : le dôme, c’est-à-dire la Cathédrale de Milan, une des plus grandes du monde ;
Pordenone : ville du nord-est de l’Italie ;
arditi : « Reparti d’assalto », unités de l’armée italienne équipées de pistolets-mitrailleurs ;
Loop : quartier d’affaires de Chicago, le deuxième quartier d’affaires des États-Unis après celui de New York.
Lincoln Park : le plus grand parc public de Chicago, le deuxième des États-Unis après Central Park à New York.
Contexte : Hemingway et Agnes von Kurowsky
La nouvelle est directement inspirée de la vie de l’auteur. En 1918, Hemingway rejoint la Croix Rouge italienne en tant que conducteur d’ambulance, à défaut d’avoir pu s’engager comme soldat dans l’armée américaine. Il n’a pas encore dix-neuf ans lorsqu’il est blessé, en particulier aux jambes. Hospitalisé à Milan, il fait la connaissance de l’infirmière de la Croix Rouge Agnes von Kurowsky, américaine de vingt-six ans, dont il tombe bientôt amoureux. Elle le surnomme affectueusement « Kid », et lui l’appelle « Mme Kid ». La guerre les sépare : elle se rend à Florence, puis à Trévise, près de Padoue, tandis qu’il parcourt l’Italie sans retourner au front. Ils s’écrivent autant que possible, se revoient quelquefois.
Hemingway quitte l’Italie (depuis Gênes, comme dans sa nouvelle) sans que la relation n’ait été consommée, d’après Agnes von Kurowsky elle-même. Le jeune homme est persuadée qu’une fois qu’il aura un travail stable, elle le rejoindra pour l’épouser. Mais dans une lettre de mars 1919, elle l’informe qu’elle rompt. Marceline, sœur d’Ernest Hemingway, en témoigne « Des jours durant Ernie avait guetté le courrier. Il était irritable, à fleur de peau à force d’attendre. Puis la lettre arriva. Après l’avoir lue il alla au lit, et fut vraiment malade. D’abord, nous ne sûmes pas ce qu’il arrivait à Ernie. Il ne réagissait pas au traitement, et il avait de la fièvre. Papa s’inquiétait pour lui. Je montai dans la chambre d’Ernie pour voir si je pouvais faire quoi que ce soit pour l’aider. Ernie me tendit la lettre. “Lis-la,” dit-il d’une voix montée des tréfonds de la douleur. “Non. Je vais te dire.” Ensuite il se tourna vers le mur. Il resta physiquement malade encore plusieurs jours, mais ne mentionna plus la lettre par la suite. Ag, me raconta Ernie, ne venait plus en Amérique. À la place, elle allait épouser un major italien. Avec le temps, Ernie se sentit mieux. Il sortit de nouveau avec ses amis. » [Marcelline Hemingway, At the Hemingways, Boston, 1962, 188]
En juin, Hemingway reçoit la lettre d’Agnes dans laquelle elle explique que la famille du lieutenant italien (et non pas major !) avait interdit ce mariage, et qu’elle revenait donc célibataire en Amérique.
Hemingway ne répond pas à cette lettre, mais on peut se faire une idée de ses sentiments grâce à une lettre adressée à un de ses amis de son régiment d’ambulancier : « Hier, j’ai reçu de Rome une bien triste lettre d’Ag. Elle a rompu avec son major. Elle est en plein désarroi et dit que je devrais me sentir vengée de ce qu’elle m’a fait. La pauvre gosse. Je suis terriblement navré pour elle. Mais il n’y a rien que je puisse faire. J’étais amoureux d’elle, et elle m’a trompé. Et je ne lui en veux pas. Mais j’ai entrepris de cautériser la plaie du souvenir que j’ai d’elle, et de le réduire en cendres grâce à une combinaison d’alcool et de femmes, et maintenant c’est réglé. » [Baker, Selected Letters, 25]
Hemingway en tout cas en tire d’abord une nouvelle en 1924, A Very Short Story, dont il fait une des « vignettes » d’un ensemble de 18 qu’il appelle in our time (sans majuscule) et publie en France : le texte d’A Very Short Story est alors la dixième et la plus longue. Le personnage de l’infirmière est alors nommée « Ag », l’intrigue se déroule à Milan.
Pour l’édition américaine de 1925 modifiée en In Our Time, A Very Short Story n’est plus une vignette mais une nouvelle en tant que telle. Surtout, Hemingway prétend vouloir éviter les poursuites en diffamation, et change « Ag » en « Luz », Milan en Padoue, le quartier de The Fair (New York) devient le Loop de Chicago.
Cette histoire semble avoir marqué durablement Hemingway, qui la réutilise pour un roman inachevé, « Along With Youth », puis pour son roman célèbre A Farewell to Arms (L’Adieu aux armes, 1929) où Agnes devient Catherine Barkley.
Pistes d’analyse
La nouvelle introduisant des thèmes et des motifs récurrents d’Hemingway a été largement commentée. Je me contenterai de souligner l’emploi par Hemingway de l’ellipse et du sommaire (soit, en narration, le résumé rapide des actions d’un personnage), et cite ci-après les propos de l’universitaire Thomas Strychacz : « L’histoire progresse par de bizarres changements de ton. Au début, le protagoniste fait typiquement preuve d’une grande maîtrise de soi, quand il est mis sous anesthésie, « il se renferma en lui-même pour éviter de jacasser, quand le produit ferait effet et que viendrait le moment des paroles en l’air ». Plus loin, après avoir prié au Duomo, le couple souhaite se marier « pour faire en sorte de ne pas perdre [leur amour] ». Ensuite, le ton sérieux de l’histoire se dissout au cours de la plus drôle des lettres du type « Cher John », de façon déconcertante : « le major du bataillon fit la cour à Luz, et elle n’avait jamais connu d’Italiens auparavant, et finalement elle écrivit aux États-Unis que leur liaison n’avait été qu’une amourette. Elle était désolée, et elle savait qu’il ne pourrait sans doute pas comprendre, mais la pardonnerait peut-être un jour, et lui serait reconnaissant, et elle s’attendait, de façon absolument inattendue, à être mariée au printemps ». La quasi contradiction de « elle s’attendait, de façon absolument inattendue » suffit à transmettre l’insincérité totale de la lettre. Rarement le procédé de la parataxe utilisé par Hemingway a-t-elle paru aussi appropriée que lors de l’insouciante légèreté de Luz accumulant maladroitement les clichés, l’un après l’autre, de façon à échapper délibérément à une expression franche des émotions. Et rarement l’euphémisme, procédé fréquent d’Hemingway, a-t-il aussi bien servi que pour le dénouement décevant de l’intrigue : « Peu de temps après il contracta une blennorragie, refilée par une vendeuse d’un grand magasin du Loop, alors qu’il traversait Lincoln Park en taxi ». La chute est d’une drôlerie cruelle parce qu’elle est si disproportionnée à l’expérience italienne. Le dérangement engendré par la maladie et le caractère fugace des relations consommées dans des taxis en mouvement remplacent l’ancienne éthique du comportement adéquat (« il se renferma en lui-même »). Luz et le protagoniste perdent toute conception de force émotionnelle et de capacité à se connecter ; et l’intrigue, de même, se fragmente en styles disjoints et en différentes teintes émotionnelles.”
Sources :
Robert Scholes, “Decoding Papa: ‘A Very Short Story’ as Work and Text”, Semiotics and Interpretation (Yale 1982), reprinted in New Critical Approaches to the Short Stories of Ernest Hemingway, ed. Jackson J. Benson (Duke 1990) 37, 43-46 ;
Thomas Strychacz dans son article “In Our Time, Out of Season”, tiré de The Cambridge Companion to Hemingway, ed. Scott Donaldson, (Cambridge 1996) 72-73.
Le lecteur peut également lire une autre traduction de la nouvelle en suivant ce lien (il semble qu’il s’agit de la traduction Gallimard).
A Very Short Story
One hot evening in Padua they carried him up onto the roof and he could look out over the top of the town. There were chimney swifts in the sky. After a while it got dark and the searchlights came out. The others went down and took the bottles with them. He and Luz could hear them below on the balcony. Luz sat on the bed. She was cool and fresh in the hot night.
Luz stayed on night duty for three months. They were glad to let her. When they operated on him she prepared him for the operating table; and they had a joke about friend or enema. He went under the anaesthetic holding tight on to himself so he would not blab about anything during the silly, talky time. After he got on crutches he used to take the temperatures so Luz would not have to get up from the bed. There were only a few patients, and they all knew about it. They all liked Luz. As he walked back along the halls he thought of Luz in his bed.
Before he went back to the front they went into the Duomo and prayed. It was dim and quiet, and there were other people praying. They wanted to get married, but there was not enough time for the banns, and neither of them had birth certificates. They felt as though they were married, but they wanted everyone to know about it, and to make it so they could not lose it.
Luz wrote him many letters that he never got until after the armistice. Fifteen came in a bunch to the front and he sorted them by the dates and read them all straight through. They were all about the hospital, and how much she loved him and how it was impossible to get along without him and how terrible it was missing him at night.
After the armistice they agreed he should go home to get a job so they might be married. Luz would not come home until he had a good job and could come to New York to meet her. It was understood he would not drink, and he did not want to see his friends or anyone in the States. Only to get a job and be married.
On the train from Padua to Milan they quarreled about her not being willing to come home at once. When they had to say good-bye, in the station at Milan, they kissed good-bye, but were not finished with the quarrel. He felt sick about saying good-bye like that.
He went to America on a boat from Genoa. Luz went back to Pordonone to open a hospital. It was lonely and rainy there, and there was a battalion of arditi quartered in the town. Living in the muddy, rainy town in the winter, the major of the battalion made love to Luz, and she had never known Italians before, and finally wrote to the States that theirs had only been a boy and girl affair. She was sorry, and she knew he would probably not be able to understand, but might some day forgive her, and be grateful to her, and she expected, absolutely unexpectedly, to be married in the spring. She loved him as always, but she realized now it was only a boy and girl love. She hoped he would have a great career, and believed in him absolutely. She knew it was for the best.
The major did not marry her in the spring, or any other time. Luz never got an answer to the letter to Chicago about it. A short time after he contracted gonorrhea from a sales girl in a loop department store while riding in a taxicab through Lincoln Park.